CLIFF part du principe qu’il vaut la peine d’investir dans les personnes en situation de pauvreté. Au lieu de fournir des subventions ponctuelles, CLIFF contribue à permettre aux organisations en Asie et en Afrique de fournir aux habitants de taudis un accès à des financements de logements abordables. Cette approche facilite la construction de logements abordables et génère un rendement financier qui permet aux organisations qu’elle finance d’atteindre une viabilité financière. Actuellement opérationnel dans quatorze pays, CLIFF a soutenu plus de 70 projets de logement en Asie et en Afrique entre 2010 et 2014.

Description du projet

Quels sont ses objectifs ?

CLIFF est un mécanisme de financement alternatif dirigé par les communautés. Son objectif est d’aider les habitants de taudis à améliorer leurs vies et de trouver des solutions durables à la pauvreté urbaine. CLIFF vise à améliorer les logements et les services basiques des habitants de taudis, des problèmes qui ne sont pas pris en charge par le gouvernement local ou le secteur privé. CLIFF est un projet coordonné et financé en partie par l’organisation britannique Reall (anciennement connue sous le nom Homeless International). Il fournit des financements abordables à ses partenaires chargés de la mise en œuvre. Reall travaille ensuite avec ces organisations afin de développer des projets de logement accessibles financièrement pour les communautés à bas revenus. L’ambition à long terme de CLIFF est d’étendre ce projet. Pour ce faire, il :

  • Utilise les projets comme des projets de démonstration.
  • Réduit le risque d’investissement dans des logements pour les personnes à bas revenus.
  • Débloque des investissements privés importants pour des prochains projets CLIFF.

L’approche de CLIFF consiste à développer des projets de logement autonomes capables de créer des hébergements et des services durables. Pour ce faire, le projet développe des partenariats avec des partenaires chargés de la mise en œuvre, des bailleurs de fonds et des partenaires techniques. Reall joue un rôle stratégique de gestion et de coordination dans ce processus. CLIFF fournit des subventions et des capitaux sous forme de fonds de roulement aux partenaires chargés de la mise en œuvre. Ceux-ci utilisent les fonds de roulement pour proposer des emprunts et réaliser des investissements stratégiques, comme l’achat de terrains. Grâce au projet CLIFF, ces partenaires peuvent également influencer les politiques nationales et faire entendre les opinions des populations pauvres dans les régions urbaines aux niveaux local, régional et national.

Dans quel contexte opère-t-il ?

Selon l’ONU-Habitat, plus d’un milliard de personnes vivent dans des taudis. La grande majorité de ces taudis sont situés dans les pays en voie de développement. Les besoins de cette population en matière de logement et de services basiques ne sont pas pris en charge de façon adéquate par les gouvernements locaux ou le secteur privé. Les organismes chargés de l’aménagement du territoire, des marchés fonciers et des services basiques sont souvent inefficaces. Ils manquent souvent de ressources et des compétences nécessaires. Les projets axés sur les marchés et visant à améliorer les taudis sont souvent à court terme et ne sont pas soutenus par des organismes publics responsables, et les fonds sont insuffisants étant donné les montants nécessaires pour lutter contre le problème.
Le programme CLIFF a été créé dans ce contexte et part du principe qu’il vaut la peine d’investir dans les populations pauvres des régions urbaines. Le programme se fonde sur la logique que si l’on crée et maintient une organisation de mise en œuvre durable financièrement, le programme continuera de grandir, quel que soit l’apport des bailleurs.
CLIFF possède 14 partenaires dans 15 pays en voie de développement et est impliqué dans 70 projets dans 33 villes. Il travaille également dans la mesure du possible avec des autorités municipales et se positionne pour pouvoir recevoir des fonds/emprunts tant du secteur privé que de bailleurs ou organismes bancaires.

Quelles sont les principales caractéristiques du projet ?

Ce qui différencie CLIFF des autres projets est qu’il part du principe qu’il vaut la peine d’investir dans les populations pauvres des régions urbaines. CLIFF a été créé sur la conviction que des logements et services basiques conçus de façon appropriée et abordable peuvent être payés par les populations pauvres des régions urbaines. Par conséquent, le programme tente de lutter contre l’exclusion actuelle de ces populations des financements appropriés de logements. Pour ce faire, CLIFF renforce les capacités des organisations locales qui s’engagent à soutenir les populations pauvres des régions urbaines et se fonde sur une double approche :

  • Renforcer les capacités des organisations partenaires, en les aidant à consolider leurs points forts et à améliorer leurs points faibles. Grâce à l’aide du projet CLIFF, de nombreux partenaires chargés de la mise en œuvre ont développé leur capacité à influencer les politiques des gouvernements locaux et nationaux et des institutions financières. Au Népal par exemple, LUMANTI, une ONG nationale et partenaire du projet CLIFF, a réussi à obtenir 80 pour cent des coûts totaux du projet des institutions bancaires locales.
  • Outre le renforcement de leurs capacités, CLIFF fournit aux partenaires chargés de la mise en œuvre des capitaux sous forme de fonds de roulement pour acheter des terrains, construire des logements et fournir des petits prêts hypothécaires abordables aux habitants de taudis. Au début du programme CLIFF, les fonds n’étaient réinjectés qu’au niveau national. Toutefois, alors que les partenaires chargés de la mise en œuvre sont devenus des entreprises de développement communautaire, un changement d’approche a été opéré. Dans les grandes lignes,

Reall octroie à présent des emprunts aux partenaires du projet CLIFF, permettant aux fonds réinjectés d’être réutilisés n’importe où dans le monde. Cette approche encourage une discipline financière parmi les partenaires chargés de la mise en œuvre du projet CLIFF et permet un accès à des fonds plus importants et plus adaptés.

Grâce à des partenariats de longue durée, CLIFF peut aider les organisations partenaires à acquérir une durabilité opérationnelle. De cette façon, le programme démontre sa volonté de développer des organismes capables d’accéder à des sources durables de financement et de développer des projets de logement à grande échelle et de longue durée.

Comment est-il financé ?

À l’heure actuelle, le projet CLIFF est financé par deux bailleurs internationaux, le ministère britannique du Développement international (DFID) et l’Agence suédoise de coopération internationale pour le développement (SIDA). En 2013/14, le plus grand bailleur était le DFID, qui s’est engagé à financer le projet jusqu’en 2015. Des discussions sont déjà en cours pour prolonger l’aide du DFID pour la troisième phase du projet CLIFF. Le projet possède une bonne durabilité économique, avec de nombreux partenaires déjà en mesure de recevoir des emprunts de capitaux. En termes de taux de remboursement des communautés, CLIFF vise un taux de remboursement de 100 pour cent, les partenaires étant encouragés à maintenir un taux de portefeuille à risque d’entre 5 et 10 pour cent.
Au départ, CLIFF fournit des subventions pour aider ses partenaires locaux chargés de la mise en œuvre à renforcer leurs capacités. Avec le temps, cette subvention est progressivement réduite jusqu’à être supprimée, les organisations couvrant leur coûts opérationnels grâce à une planification organisationnelle efficace. La réduction des subventions permet d’accroître les fonds disponibles pour les projets d’investissement.
En 2013/14, CLIFF a dépensé 7 685 753 Livres sterling en subventions et emprunts pour ses partenaires. La même année, il a généré 10 801 603 Livres sterling de revenus (incluant 1 377 539 Livres transférés de l’exercice précédent). Ses revenus proviennent principalement d bailleurs. Les coûts d’exploitation du projet CLIFF étaient de 678 355 Livres sterling. L’excédent de revenus par rapport aux dépenses pour la période a été absorbé par le programme dans la première partie de l’exercice 2014/15.

Quel est l’impact du projet ?

Le projet CLIFF a un impact très positif sur les communautés participantes. Ce système de financement de logements a permis la construction de nombreux logements adéquats et abordables qui n’auraient jamais été construits sans ce projet. De fait, ce projet a un effet catalyseur engendrant la construction de nouveaux logements. Par exemple, CLIFF a financé la construction de 180 maisons par la coopérative de logement Vashandi au Zimbabwe mais cela a conduit à la construction de 500 maisons supplémentaires, et 500 nouvelles maisons sont en cours de construction. En outre, la construction de logements a des effets positifs sur l’activité économique locale. Le projet de Vashandi a ainsi permis la création directe d’au moins 200 emplois.

Au total, le programme CLIFF a approuvé, commencé et terminé la construction de 10 699 logements. En avril 2014, 17 183 personnes occupaient déjà leur nouveau logement, qui disposait également de meilleurs sanitaires, et 35 062 devaient bénéficier de ce projet. Outre les projets de logement, le programme CLIFF devrait également venir en aide à 101 617 autres personnes grâce à des projets d’assainissement et de sanitaires approuvés en Inde et au Népal.
CLIFF a également influencé les politiques du logement dans de nombreux pays en voie de développement. L’influence des politiques est un des indicateurs de performance du projet CLIFF. Il visait initialement des changements politiques dans six pays. En réalité, huit pays ont modifié leurs politiques. Par exemple, le partenaire angolais du projet CLIFF, DWA, a réussi à obtenir une réduction de la condition relative à la taille de parcelle minimale. ZINAHCO, le partenaire du projet CLIFF au Zimbabwe, a obtenu la reconnaissance officielle du modèle coopératif en matière de logement. Certains projets ont également réussi à modifier les politiques d’investissement des créanciers. Au Népal, LUMANTI a réussi à obtenir pas moins de 80 pour cent du coût total du projet d’institutions bancaires locales, un pourcentage inaccessible par le passé. Le projet a obtenu une reconnaissance internationale en recevant le Prix d’honneur de l’ONU-Habitat en 2014.

 

Aspects innovants

Partant du principe que les populations pauvres en région urbaine nécessitent un investissement et des prêts, le projet met en œuvre ses programmes en adoptant une double approche.

Ce projet est innovant car il renforce les capacités des organisations partenaires et leur permet de travailler sur des aspects plus complexes des programmes de logement, tels que les terrains et les financements. Différents partenaires du projet ont également amélioré leur capacité à influencer les politiques d’investissement des banques locales et nationales. Au Népal par exemple, LUMANTI, une ONG nationale partenaire du projet CLIFF, a obtenu 80 pour cent du coût total du projet des institutions bancaires locales. CLIFF utilise les bailleurs de façon innovante. Il les utilise pour renforcer les capacités des partenaires via des « fonds de capacité » et leur fournit en plus des fonds en capital récupérables pour acheter des terrains, prêter des micro-hypothèques aux habitants de taudis et investir dans la construction physique. Tous les fonds en capital sont récupérables. Lorsqu’ils sont récupérés, les fonds sont recyclés via les mêmes partenaires ou d’autres partenaires.

 

Quel est l’impact sur l’environnement ?

Les projets CLIFF ont la possibilité de réduire l’empreinte carbone du développement urbain en prônant des constructions et technologies durables. Un bon exemple est l’utilisation de briques de terre à Tansen, au Népal, qui englobent très peu d’énergie grise et qui sont disponibles localement de sorte qu’il est possible de réaliser des économies sur le transport et les coûts énergétiques.

En outre, la construction d’appartements de LUMANTI à Lalitpur, au Népal, lutte contre les fréquentes pénuries d’eau de la ville en mettant en place un système de récupération de l’eau de pluie, offrant aux résidents un accès constant à l’eau pour le nettoyage et la cuisine en utilisant peu d’énergie. Par ailleurs, l’utilisation d’énergie solaire permet de se protéger contre les pannes fréquentes de courant des villes.

 

Le projet est-il viable sur le plan financier ?

L’objectif à long terme est de permettre au projet CLIFF de devenir complètement autonome, même si cet objectif ne pourra pas être atteint avant plusieurs années. La croissance du projet est possible grâce à la contribution des bailleurs. Pour le moment, des bailleurs désirent participer au renforcement des capacités du projet CLIFF. Le projet CLIFF a été mis en place avec une durabilité financière établie à tous les niveaux. Le projet aide les partenaires nationaux à grandir suffisamment pour générer une rentabilité financière suffisante leur permettant de poursuivre leurs activités sans nécessiter de subventions. Cela a permis aux organisations de chercher des sources alternatives d’investissement afin de devenir pleinement autonomes.

Quel est son impact social ?

Le projet fournit une aide aux personnes qui, sans ce projet, ne pourraient participer au processus de développement urbain. Il encourage une meilleure coopération au sein de la communauté ainsi que l’égalité des sexes.
Plus de 75 pour cent des bénéficiaires du programme sont des femmes et des enfants, et le modèle offre une aide particulière aux initiatives favorisant la cohésion sociale à travers l’autonomisation des groupes de femmes épargnantes. Dans certains pays, le programme CLIFF a soutenu des projets pour les personnes handicapées, offrant un espoir unique à ce public défavorisé. Dans tous les cas, le programme renforce les capacités des organisations communautaires pour négocier et mieux gérer leurs activités.

 

Obstacles

  • Les gouvernements locaux représentent souvent un obstacle majeur pour le projet. L’expérience du projet montre que le secteur du logement est négligé, incompris ou mal financé dans les pays en voie de développement. Par conséquent, dans certains cas, le travail de CLIFF est considéré comme l’unique solution.
  • En outre, on attend de certains partenaires du projet qu’ils règlent de nombreux problèmes connexes comme la complexité des régimes fonciers et l’offre continue de matériaux.
  • Dans certains pays où le projet est mis en œuvre, il existe des préjugés concernant le rôle des organisations internationales. Elles sont considérées comme des organisations militantes ou des organisations qui offrent des biens gratuits. Il a été difficile de communiquer le rôle de CLIFF pour renforcer les capacités financières et techniques.
  • CLIFF estime que cela vaut la peine d’investir dans les populations pauvres des régions urbaines. Toutefois, les grandes institutions financières sont sous pression pour proposer des « crédits sûrs » et ne comprennent pas directement l’utilité de cet investissement. Le défi pour CLIFF est de démontrer cette bancabilité pour attirer des bailleurs privés.

 

Leçons retenues

  • Il importe de mettre en œuvre ces programmes à grande échelle pour avoir un vrai impact sur les connaissances et les pratiques dans le secteur. Cela implique de modifier différentes pratiques dont l’engagement de la communauté et les modèles financiers.
  • CLIFF considère que les partenaires doivent devenir des nouvelles institutions urbaines qui réduisent le fossé entre les marchés et les gouvernements. Par conséquent, la modélisation économique et la viabilité financière à long terme sont extrêmement importantes pour les partenaires du projet.
  • CLIFF pense qu’il est possible et intéressant d’investir dans les populations pauvres des régions urbaines. Toutefois, il importe de reconnaître que le financement n’est pas le seul facteur important et qu’il convient d’également de placer l’accent sur la fourniture des logements.

 

Évaluation

CLIFF fixe ses propres objectifs de performance et les suit en continu. Des rapports de suivi sont rédigés tous les trois mois, en sus de grandes évaluations externes commandées par les bailleurs. Les indicateurs sur le financement et la croissance démontrent que le projet dépasse ses objectifs. Les indicateurs sur la fourniture de services basiques montrent en revanche que certains efforts doivent encore être consentis. Les conclusions des rapports/évaluations sont utilisées pour améliorer le programme.

 

Transfert

Le projet est en phase d’expansion. Lorsqu’il a démarré en 2002, CLIFF était opérationnel dans un seul pays (Inde) mais il est maintenant appliqué dans dix pays. Le nombre de logements construits par le biais du projet augmente chaque année. Tout porte à croire que cette expansion se poursuivra. Les partenaires nationaux renforcent également leurs capacités. Il n’existe pas de donnée indiquant un quelconque transfert en dehors du projet, mais cela n’est peut-être pas nécessaire.

Il existe des données indiquant que des projets locaux fournissent davantage de logements. Trois partenaires nationaux (LUMANTI au Népal, NACHU au Kenya, et ZINAHCO au Zimbabwe) sont devenus les plus grands fournisseurs de logements pour les populations pauvres de leur pays respectif. De nombreux projets individuels ont permis de renforcer l’apprentissage et de diffuser des bonnes pratiques.

Il existe également de nombreuses données indiquant des transferts sur le plan national. Le nombre de partenaires nationaux a augmenté de façon significative. De nombreux partenaires se sont engagés dans le transfert de bonnes pratiques au sein de leur pays voire parfois à l’étranger. LUMANTI au Népal a ainsi créé un centre de recherche et a contribué à établir des nouveaux centres de recherche dans les régions du pays où le projet CLIFF est mis en œuvre.

Sur le plan international, on a également constaté le transfert du projet. Le projet s’est étendu dans dix pays. Les données démontrent une bonne collaboration entre les différents partenaires nationaux. Un nouveau partenaire important, WAT- HST de la Tanzanie, a reçu une aide importante de plusieurs partenaires du Kenya, du Malawi et du Zimbabwe, ce qui lui a permis d’augmenter ses activités.