Le Burkina Faso, le Mali et le Niger sont situés dans le Sahel, une région semi-aride de l’Afrique, au sud du Désert du Sahara. Il s’agit d’une des régions les plus pauvres du monde avec peu de ressources naturelles, où la majorité des personnes vivent de l’agriculture et de l’élevage. La sécheresse et la surconsommation du bois et des matières organiques au cours des vingt dernières années ont engendré une pénurie du bois local. Le bois adapté aux constructions est à présent extrêmement rare et très couteux. La surutilisation du bois a également engendré une érosion des sols et une désertification progressive. Des petites huttes de terre avec des toitures végétales et des maisons en briques de terre comprimée qui utilisent une grande quantité de bois pour la construction des toits sont les principales formes de logement dans la région et sont de moins en moins viables et de moins en moins durables.

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Les constructions sans bois – toitures en dômes et en voûtes utilisant des briques moulées à la main – ont été introduites dans la région du Sahel en 1980 par Development Workshop, une petite ONG canadienne et française, désireuse de développer et de promouvoir des solutions durables pour les problèmes de logement. Les techniques de construction de toits en dômes et en voûtes trouvent leur origine au Moyen-Orient.

Les matériaux alternatifs comme le ciment ou la tôle sont trop couteux pour la grande majorité des locaux. Étant donné que la terre disponible localement est abondante et que les locaux sont capables de mouler à la main leurs propres briques, l’utilisation de méthodes de construction sans bois présente une technique abordable et permet de réduire l’épuisement du bois et la dégradation de l’environnement.

Les autres avantages de cette méthode de construction sont que les toits ne s’écroulent pas de façon soudaine (un problème récurrent avec les toits plats), les maisons sont plus fraîches en été et plus chaudes en hiver, elles sont moins couteuses et sont plus durables. Les maisons sont également considérées comme étant prestigieuses et confèrent un certain statut dans les villages.

Les murs et les fondations des bâtiments sont composés de grands blocs de terre similaires aux murs des autres maisons. Les toits sont en dômes ou en voûtes au lieu d’être plats, et sont construits à partir de petites briques de terre. Aucun coffrage n’est nécessaire durant la construction. Des briques de terre moulues à la main et séchées au soleil et du mortier sont utilisés. Aucun ciment n’est ajouté et cette technique nécessite très peu de matériel spécifique. L’utilisation des briques de terre est adaptée au climat local, où il pleut rarement mais sous forme d’averses fortes et brèves. Les toits légèrement inclinés et les grandes gouttières facilitent l’écoulement de l’eau afin de prévenir les dégâts des eaux, même en période d’averse intensive. Les bâtiments sont solides et peuvent durer de nombreuses années s’ils sont bien entretenus.

Cette méthode de construction est adaptée tant pour le secteur formel que pour le secteur informel de la construction, et est également adaptée pour la construction d’hôpitaux, de mosquées, de bureaux, d’hébergements et de grandes maisons. Des dômes uniques peuvent être utilisés pour couvrir des espaces carrés ou ronds, et les voûtes sont davantage utilisées pour couvrir des espaces rectangulaires. La combinaison de plusieurs voûtes et dômes peut être utilisée pour répondre à différentes exigences en matière de construction. De nombreuses organisations non-gouvernementales travaillant dans le Sahel et de nombreuses organisations gouvernementales utilisent maintenant ces méthodes de construction pour les bâtiments dans les régions rurales.

L’introduction des constructions sans bois reste un processus et non un produit. Les premières constructions de ce type au début des années 80 fournissaient des formations sur le terrain à quelques maçons locaux. Au cours de cette période, il a fallu adapter les techniques du Moyen-Orient pour qu’elles soient adaptées aux compétences locales, notamment grâce à la collaboration entre Peter Tunley de Development Workshop et les entrepreneurs locaux du nord du Niger. Ce travail a servi de base pour les futures activités régionales.

Alors que la demande pour des entrepreneurs qualifiés était en hausse, il était nécessaire de fournir des formations adaptées. Development Workshop a développé une formation de huit semaines pour les entrepreneurs novices, et les formations sont devenues plus régulières en 1992. Development Workshop a ensuite formé des formateurs locaux, qui travaillaient avec un manuel pour les formateurs. Aujourd’hui, les formations sont dirigées par des équipes locales. À ce jour, plus de 720 maçons ont été formés. Il importe également de s’adapter aux conditions locales, afin de faciliter l’apprentissage de ces techniques et de les rendre davantage adaptées aux différents besoins locaux.

Un maçon formé gagne bien sa vie, gagnant trois fois plus qu’un travailleur manuel, et est un membre respecté de la communauté. Des cours de rappel pour les maçons et des manuels de formation faciles à comprendre développés par Development Workshop sont disponibles afin de maintenir un contrôle de la qualité des constructions. L’accent est également placé sur l’importance pour les familles de bien entretenir leurs logements.

Bien plus de 1.000 logements ont été construits selon cette technique, et de nombreux autres logements ont maintenant été construits dans la mesure où cette méthode de construction est maintenant entrée dans la culture de construction de la région du Sahel. Très peu de personnes se sont opposées à cette technologie, qui présente les avantages d’être moins couteuse que les alternatives modernes et de durer plus longtemps que les techniques traditionnelles. Elle offre en plus des logements de qualité. Ce processus exige beaucoup de main-d’œuvre et fournit un emploi à de nombreux hommes qui seraient autrement au chômage. Au fil des ans, de nombreuses adaptations ont été apportées au processus de construction (essentiellement sur base de la technique des voûtes nubiennes) afin de s’adapter tant aux besoins et aux compétences des maçons et des usagers qu’au contexte local.

Le coût moyen de main-d’œuvre d’une maison dans une région rurale est d’environ 110 dollars et les briques sont moulues à partir de la terre disponible localement, ce qui ne coûte pratiquement rien. La famille peut contribuer à la construction des logements, ce qui permet de réduire les coûts. Les maisons sont payées par les locaux. Dans les régions rurales, les maçons proposent souvent leurs services en échange de nourriture par exemple, surtout si la maison est destinée à un membre de leur famille ou à un ami proche. Dans une région urbaine, le coût s’élève à 400 dollars car les matériaux de construction doivent être achetés et transportés, en plus des coûts de main-d’œuvre. Le coût des programmes de formation pour les maçons est pris en charge par des fonds externes, mais tous les coûts directs de construction sont pris en charge par les familles locales.

Ces constructions changent complètement la vie de personnes qui font partie des personnes les plus pauvres du monde, mais elles ne se limitent pas forcément aux régions arides. Elles encouragent le respect de soi et l’entraide, fournissent des opportunités d’emploi et créent des opportunités de génération de revenus. Elles offrent en outre une solution peu couteuse de logement dans de nombreuses parties du globe qui sont confrontées à une pénurie de bois. Pour les familles qui vivent et travaillent dans ces bâtiments, ces constructions offrent un meilleur environnement.

Partenariat

ONG, communauté locale, organisme donateur